VI-1 - Entre Juifs et Chrétiens, Jésus (2001)

Revue des Facultés de Théologie et de Philosophie

Présentation du premier volume du 6ème tome de la revue Théophilyon

Daniel Marguerat - Jésus historique : une quête de l’inaccessible étoile ? Bilan de la « troisième Quête ».

La «troisième Quête» du Jésus historique relance le débat sur des acquis de la recherche. Bien qu'il s'agisse d'une nébuleuse de positions dissemblables plutôt que d'un courant homogène, cette constellation de chercheurs remet en cause le consensus antérieur. Son nouveau paradigme peut être saisi sur cinq points :

  • Les sources documentaires sur Jésus sont étendues et leur exploitation modifiée.
  • On relève un puissant retour à la judaïté du Nazaréen.
  • Le cœur de l'agir de Jésus n'est plus nécessairement une position millénariste, mais une conviction sapientiale.
  • L'histoire sociale met en valeur la réaction du messianisme populaire contre une politique d'acculturation gréco-romaine en Palestine.
  • Une christologie implicite redevient pensable au niveau de Jésus lui-même.

Charles Perrot - Jésus, le lecteur des Écritures

A partir du témoignage évangélique des églises, jusqu'à quel point est-il possible de distinguer la pratique de lecture de Jésus et son usage des citations bibliques ? Constatons d'abord la diversité des pratiques de lecture dans le monde de l'époque, privilégiant plutôt Isaïe, les Douze Prophètes et les Psaumes. À partir des citations bibliques, repérées surtout dans la triple tradition (Mc, Mt et Lc), on voit Jésus user des règles d'interpré-tation de son temps, mais avec discrétion. Sa lecture est populaire, continuellement interpellante, souvent critique et comme en surplomb par rapport au texte biblique lui-même. La citation biblique ne sert plus à prouver ses dires, mais à situer son action de salut.

Dominique Cerbelaud - La christologie interdite

La « troisième quête » du Jésus historique a pour effet de faire chanceler l'édifice de la christologie dogmatique, comme si la longue domination du « Christ » sur « Jésus » venait à se renverser. Faut-il dès lors considérer toute christologie comme interdite (illégitime ou impraticable) ? Force est de reconnaître qu'après l'âge d'or des années 1950-1980, cette partie de la dogmatique ne se renouvelle plus guère, les théologiens préférant suivre des chemins de traverse en réactivant la question sotériologique ou en élaborant une théologie des religions. La christologie reste ainsi interdite : elle se tient coite, réduite au silence. Une urgence s'impose pourtant : celle de penser cette nouvelle relation entre « Jésus » et « Christ », ce qui revient à articuler ce qu'il en est de la résurrection. La christologie pourra dès lors s'interdire, en explorant cet intervalle décisif et fondamental.

Jean-Pierre Lémonon - Paul a-t-il déjudaïsé Jésus ?

Jésus n'a pas voulu sortir du judaïsme, il s'est situé comme un maître au milieu d'autres maîtres. Il a participé aux débats de son temps. Ce point de vue est largement admis. Par contre le regard porté sur Paul est souvent différent. Paul aurait fait sortir le groupe des disciples de Jésus du contexte juif, à un point tel qu'on pourrait considérer qu'il a coupé en partie les liens qui liaient le Christ à son peuple. En fait, Paul accorde une grande attention à Jésus de Nazareth ; sa prédication est dans la ligne de celle du Maître. Comme Jésus, mais en des termes différents, Paul proclame la réconciliation de tous les hommes avec Dieu. La foi du Christ qui se manifeste dans sa mort et résurrection, est au cœur de la pensée et de la prédication de Paul. Tout au long de son ministère, l'Apôtre des païens est soucieux du salut d'Israël. Mais, sans renier la judéité de Jésus, le souci premier de Paul est de proclamer la Seigneurie universelle du crucifié.

Jean-Marc Chouraqui - Réflexions d’un juif sur Jésus

Prononcer le nom même de Jésus fut longtemps tabou chez les Juifs. C'est que lorsqu'un Juif évoque ce nom, c'est l'histoire de ceux qui devaient en témoigner qui surgit à son esprit et qui ont persécuté ses pères. L'histoire de l'Église corps mystique (mais à ses yeux historique) du Christ recouvre la face de Jésus. Une fois dépassé l'obstacle affectif de la mémoire historique, traumatique, le Juif avant de rencontrer l'homme rencontre le dogme Jésus et notamment celui de l'Homme-Dieu, là où le judaïsme ne connaît que des hommes de Dieu. Histoire de l'Église et dogmes éloignent le Juif de Jésus. Seul son message avant sa mort peut interpeller le Juif qui souvent y reconnaîtra des accents ou des textes de la tradition biblique ou talmudique. L'Église qui pendant des siècles a rendu souvent insupportable aux Juifs le nom de Jésus, devrait pour le rendre audible, accepter de faire retour (étymologiquement Techouvah-repentance) aux sources juives de son message en les valorisant sans plus les occulter voire dénigrer. Elle a commencé à le faire. Des chercheurs juifs peuvent l'y aider qui depuis quelques décennies ont réintégré Jésus au sein de son peuple.

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