Étude topographique et cytophysiologique du système hypothalamo-neurohypophysaire chez le lézard saharien herbivore Uromastyx acanthinura (Wenery Möller, 1922)

implication dans l'équilibre hydrominéral.

Zohra BARKA-DAHANE, 2007

Thèse de Doctorat d’État algérien préparé partiellement au laboratoire

Résumé

L'un des problèmes physiologiques majeurs posés aux espèces déserticoles est l'obtention de l'eau et sa conservation au niveau corporel. Ce problème se pose avec plus d'acuité chez les vertébrés à régime alimentaire végétarien parce qu'en  milieu désertique le développement de la couverture végétale est aléatoire, étroitement dépendante des précipitations. Uromastyx acanthinura  le seul lézard herbivore du Sahara fait partie de ces espèces. Face à la restriction hydrique, ce reptile a acquit une indépendance vis à vis de l'eau de boisson ; la conservation de ce liquide  précieux provenant de son alimentation végétale est donc fondamentale pour sa survie. Il est connu que l'hormone antidiurétique (ADH) intervient dans l'équilibre hydrominéral en augmentant la perméabilité des tubes rénaux, distal et collecteur, favorisant ainsi le retour de l'eau vers le milieu interstitiel. Chez ce lézard l'intervention de cette neurohormone,  la vasotocine (AVT), au niveau rénale favorise une importante réabsorption de l'eau si bien que ses urines sont devenues solides. Plus tard il a été admis que l'ocytocine est également impliquée dans  l'homéostasie en réponse à certains  stimuli. Cette capacité d'économiser l'eau corporelle qui explique sa résistance à la déshydratation a retenu notre attention. Dans le but d'apprécier les potentialités d'adaptation de cette espèce en milieu aride nous nous sommes proposés d'effectuer une étude morpho-fonctionnelle du système hypothalamo-neurohypophysaire (SHN) impliqué dans la synthèse et la sécrétion de ces deux neurohormones. Pour cela nous avons utilisé des techniques morphologiques telles que la microscopie photonique, la microscopie électronique et l'immunohistochimie qui décrivent  ce système mais aussi renseignent  sur son activité.           

Cette étude qui a d'abord concerné des individus en activité physiologique au printemps, a montré que la vasotocine et la mésotocine sont synthétisées dans des neurones neurosécréteurs séparés. Ces derniers sont  groupés en amas cellulaires bien délimités formant les noyaux hypothalamiques supraoptiques (NSO), périventriculaires (NPeV) et paraventriculaires (NPV) qui se succèdent rostro-caudalement. Ces noyaux ont une importante extension aussi bien latérale que rostro-caudale et leur cytoarchitecture est particulière. Les NSO sont formés de trois agrégations cellulaires importantes : le NSO ventral, le NSO latéral et le NSO dorsal. Le NPeV qui chez les autres espèces est accessoire, est très développé chez ce lézard. Les NPV ont une large extension ventro-dorsale et antéro-postérieure. Dans ces différents noyaux les neurones neurosécréteurs qualifiés de neurones magnocellulaires à cause de leur grande taille, présentent un intense immunomarquage suggérant une importante synthèse de neurohormones. Les  neurones vasotocinergiques sont largement prédominants par rapport aux neurones mésotocinergiques. La  couverture astrogliale est réduite si bien que de nombreuses  juxtapositions neuronales sont observées permettant une synchronisation des stimulations qui provoque ainsi une synergie de l'activité de l'ensemble des neurones. Dans la neurohypophyse les contacts neuro-hémaux très étendus dus au retrait des processus épendymaires, favorisent la libération des neurohormones dans la circulation sanguine. Ces particularités qui témoignent d'un SHN bien développé et activé évoquent un mécanisme adaptatif à l'environnement extrême qu'est le Sahara. La comparaison de ce SHN étudié en période d'activité physiologique avec celui de la période de latence hivernale lorsque l'animal, retranché dans son terrier a un métabolisme basal modéré, a révélé d'importantes modifications morpho-fontionnelles. Ces dernières traduisent une activité ralentie du SHN. Les neurones neurosécréteurs faiblement immunomarqués sont plus petits et l'extension  des noyaux s'est réduite. Les réarrangements neuro-astrocytaires induits par l'importante couverture astrogliale, empêchent  les  juxtapositions  neuronales qui deviennent rares. Dans la neurohypophyse l'important réseau des processus épendymaires s'insinuant entre les terminaisons axoniques et la lame basale des capillaires sanguins limite leurs contacts. Ces observations évoquent une plasticité dynamique  entre les deux saisons.