Urgence climatique et droit : Quels enjeux, quelles réponses et quelles perspectives ?

Quel rôle le droit peut-il avoir ?

Droit


UCLy

Il suffit de regarder ce qui se passe autour de nous pour se rendre compte qu’il y a un changement en cours, et que celui-ci nous touche de près. Pas seulement parce que, on le sent bien, il fait chaud -bizarrement chaud- mais aussi parce qu’il y a pas mal de choses qui nous interrogent, et parfois, nous inquiètent aussi.

Giulia TERLIZZI, Enseignant - chercheur, Directrice pédagogique DU «Droit du Climat et du Développement durable», Faculté de droit, UCLy

Le changement climatique, la sauvegarde des ressources naturelles, la pollution, l’émission de CO2, l’écologie, la perte de biodiversité. Tout le monde en parle, mais sait-on vraiment ce que tout cela signifie ? Quelle est la relation entre climat et énergie, quels rôles jouent l’énergie renouvelable et les émissions de carbone dans ce scénario? Et quel rôle le droit peut-il avoir dans ces questions ? Le droit a un fort potentiel, car il permet de promouvoir et proposer des actions efficaces pour les acteurs politiques globaux dans tous ces domaines. L’importance croissante de la démocratie environnementale aux niveaux européen et international a déjà permis la création de lois visant à la sauvegarde du patrimoine énergétique de notre Terre, à la réduction de gaspillage alimentaire, à une responsabilité des citoyens comme protagonistes actifs d’une amélioration de l’environnement.

Le « droit » de l’environnement

Le droit de l’environnement est plutôt récent. La conscience, à un niveau global, est concomitante aux préoccupations qui, à partir des années soixante-dix, ont véhiculé l’idée que « l’environnement doit être protégé parce qu’il est une condition de la vie de l’Homme sur terre ». A partir de ces considérations, on est arrivé à concevoir un droit de l’environnement qui a pour objet l’environnement même et pour objectif sa protection. A partir de ces deux prémisses, le droit de l’environnement a été défini comme « l’ensemble des règles juridiques qui ont pour finalité la protection de l’environnement et, par ce biais, celle de l’Humanité ». On peut ainsi comprendre que le contenu du droit de l’environnement, comme reconnu unanimement par la communauté scientifique, comprend, outre un corpus de règles générales découlant de ses principes généraux, le droit de la nature et de la biodiversité d’une part, et le droit des pollutions et des nuisances d’autre part. En effet, comme cela a été défini dans la doctrine scientifique, le droit de l’environnement est un droit carrefour au sein des disciplines juridiques, parce qu’il « est aussi bien global que local et mobilise des règles issues de tous les ordres juridiques, international, européens ou internes »; mais il est aussi un droit «réactif» car les « catastrophes écologiques qui se sont succédées ont été autant de coup d’accélérateurs donnés à la formation d’un corpus de règles protégeant l’environnement ».

La longue marche du droit de l’environnement: Stockholm (1972) et Rio (1992)

Comme anticipé, les questions concernées sont transfrontalières et réclament l’intervention du droit international et, en particulier, l’urgence de définir une théorie de la responsabilité environnementale internationale. Le premier pas vers une conscience du problème environnemental par le droit et par la politique a été la Conférence des Nations Unies sur l’environnement tenue à Stockholm en 1972. Dans cette occasion, les Nations Unies ont déclaré une série de principes pour une gestion écologiquement rationnelle de l’environnement. La «Déclaration de Stockholm» est sans doute la première étape institutionnelle qui a « placé les questions écologiques au rang des préoccupations internationales et a marqué le début d’un dialogue entre pays industrialisés et pays en développement concernant le lien qui existe entre la croissance économique, la pollution de l’indivis mondial (l’air, l’eau, les océans) et le bien-être des peuples dans le monde entier ». A partir de cette conférence, suivie par la conférence sur l’environnement et le développement durable tenue en 1992 à Rio de Janeiro (Brésil), il y a eu une vraie prise de conscience sur l’environnement. Cette conférence a représenté une étape juridique fondamentale, culminante dans l’adoption d’une déclaration qui a fait progresser le concept des droits et des responsabilités des pays dans le domaine de l’environnement. La Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement a, à un niveau mondial, deux grandes préoccupations apparues pendant les vingt années séparant les deux conférences : d’une part, la détérioration de l’environnement, notamment de sa capacité à entretenir la vie, et, d’autre part, l’interdépendance de plus en plus manifeste entre le progrès économique à long terme et la nécessité d’une protection de l’environnement.

Le Climat et le réchauffement climatique : enjeux et réponses

Comme reconnu dans le texte de la Convention-cadre sur les changements climatiques (CCNUNCC), « les changements climatiques représentent une menace immédiate et potentiellement irréversible pour les sociétés humaines et la planète et […] ils nécessitent donc la coopération la plus large possible de tous les pays ainsi que leur participation dans le cadre d’une riposte internationale efficace et appropriée, en vue d’accélérer la réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre ». Les gaz à effet de serre (GES) ont un rôle essentiel dans la régulation du climat, toutefois, depuis le XIXe siècle, la quantité de gaz à effet de serre présents dans l’atmosphère a énormément augmenté, et par conséquence, le climat se réajuste par un réchauffement de la surface terrestre.

Face à cette situation, les représentants politiques de l’ensemble des pays de la planète ont coopéré pour mesurer l’avancée de la lutte contre le changement climatique, dans le cadre du Protocole de Kyoto, lancé en 1997 et entré en vigueur en 2005, qui définit des objectifs et des moyens pour mettre en œuvre la Convention-cadre sur les changements climatiques. Toutefois, le Protocole de Kyoto ne s’adressait qu’aux Pays Industrialisés ; en plus de la non-adhésion des États-Unis au Protocole, le retrait de la Russie, du Japon et du Canada limitaient fortement son impact global.

Dans ce scénario, le 16 Novembre 2016, le premier accord universel sur le climat/réchauffement climatique a été signé à Paris. L’accord de Paris est le fruit des précédentes négociations qui se sont tenues lors de la Conférence de Paris de 2015 sur les changements climatiques (COP21) et de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques . Cet accord a été approuvé par l’ensemble des 195 délégations le 12 décembre 2015 et il est entré en vigueur le 4 novembre 2016. L’Accord prévoit que « les États signataires s’engagent à contenir l’élévation de la température moyenne de la planète (…) étant entendu que cela réduirait sensiblement les risques et les effets des changements climatiques», à réduire l’émission de gaz à effet de serre, d’une manière qui ne menace pas la production alimentaire et, enfin, à rendre les « flux financiers compatibles avec un profil d’évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques ». Si d’un côté, on se rend bien compte que rejoindre ces niveaux est extrêmement difficile – surtout pour certains pays et compte tenu de la complexité des acteurs conjointement engagés (citoyens/consommateurs, mais aussi producteurs/entreprises/gouvernements) - et que certains pays se sont désengagés de cet Accord, d’un autre côté, on peut être conforté et stimulé par les signaux positifs provenant de certains pays qui se sont mobilisés pour mettre en œuvre une politique de lutte contre le réchauffement climatique et la pollution atmosphérique et pour élaborer une gestion durable des ressources rares.

Une faculté engagée sur les questions de Droit Environnemental

Le Droit Environnemental est un sujet complexe et en perpétuelle évolution. C’est pour cette raison que des experts, magistrats et professeurs spécialisés dans le secteur du droit de l’environnement national et international se penchent sur ces questions. On ne doit jamais oublier qu’un développement durable des ressources énergétiques implique nécessairement la création d’un lieu capable de développer une personne dans son rapport avec la nature, la création et les hommes. Une telle approche, fondée sur l’attention aux relations entre les hommes et la nature, reconnue comme partie de la Création, est le premier point de départ pour une solution qui est en même temps réelle et durable. Dans la construction d’une telle relation attentive et responsable, le droit peut et doit jouer un rôle fondamental car il est l’un des plus efficaces et puissants instruments dans les mains des hommes, des politiques en particulier, pour répondre aux défis posés par la société. Dans cette perspective, des démarches en collaboration avec le territoire et les institutions locales et internationales, la participation à la Green Week de l’Union européenne et l’instauration d’un procès fictif auprès du Tribunal Administratif Français font parties des initiatives portées par la Faculté de Droit de l'UCLy pour participer à l’engagement social et sociétal et favoriser l’implication de la jeunesse pour qui la question de l’environnement est vitale.

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