
Rencontre entre Catherine Ailloud-Nicolas et les étudiants de Lettres
Catherine Ailloud-Nicolas est dramaturge et était maîtresse de conférences à l’Université Claude Bernard Lyon 1. Elle enseigne actuellement à l’ENSATT et au Conservatoire de Lyon.
Culture Lettres modernes Métiers
mise à jour le 17 avril 2025
UCLy
Catherine Ailloud-Nicolas a notamment travaillé sur des pièces de théâtre, des spectacles de danse et d’opéra. Dernier opéra en date : Wozzeck, d’Alban Berg, mis en scène par Richard Brunel pour l’Opéra de Lyon à l’automne 2024 et Le Sang du glacier mis en scène par Angélique Clairand. C’est dans ce cadre que la dramaturge est venue échanger avec les L3 de Lettres modernes, jeudi 6 février, dans le cours de Littérature et opéra.
Le métier de dramaturge selon Catherine Ailloud-Nicolas
« C’est le plus beau métier du monde »
Catherine Ailloud-Nicolas
En plus de ses cours et de sa recherche à l’université, Catherine Ailloud-Nicolas travaille actuellement sur 3 opéras et 2 pièces de théâtre par an. Depuis 2006, elle a travaillé sur plus de 65 projets.
Pour commencer cette rencontre, elle a évoqué avec les étudiants son expérience et sa pratique personnelles en tant que dramaturge.
Un travail très en amont
En tant que dramaturge, Catherine Ailloud-Nicolas aide et accompagne le metteur en scène à partir du moment où l’opéra lui est commandé. Dans son travail avec Richard Brunel, ici pour Wozzeck, elle travaille principalement sur le livret. Au cours de cette analyse, elle repère les problèmes de plateau que vont poser les scènes. La dramaturge regarde également les autres mises en scène de l’opéra afin de voir ce qui a déjà été fait. Catherine Ailloud-Nicolas propose plusieurs pistes dramaturgiques à Richard Brunel qui choisit celle qu’il préfère ou qu’il a lui-même identifiée, et en général le choix est fait 2 ans avant l’opéra.
S’ensuit une collaboration avec le scénographe pendant 6 mois à 1 an. Le projet de mise en scène, est présenté à toute l’équipe de l’Opéra 1 an avant le début des répétitions. Il y a également un travail avec le créateur des costumes, qui présente alors son projet. Enfin, une fois la distribution connue, les répétitions commencent.
Une dramaturge de plateau
Catherine Ailloud-Nicolas se définit comme une dramaturge de plateau. Son travail ne s’arrête pas à la préparation en amont, mais continue lors des répétitions. Néanmoins, elle n’assiste pas à toutes les répétitions afin de garder une distance critique. Elle peut ainsi faire des retours au metteur en scène sur ce qu’elle voit. Pour cela, il faut que le metteur en scène soit ouvert au débat. « Je ne peux travailler qu’avec des gens avec qui je peux connecter mon imaginaire, qui ont le même goût du théâtre » explique-t-elle. Selon Catherine Ailloud-Nicolas, la dramaturgie est une activité d’imaginaire et d’inconscient, pas seulement une activité intellectuelle.
Elle conçoit le ou la dramaturge comme le collaborateur ou la collaboratrice du metteur en scène à l’endroit du sens : elle travaille avec lui sur ce qui paraît incohérent ou obscur dans le livret, ils cherchent ensemble à voir ce que l’opéra raconte aujourd’hui. C’est vraiment un travail de collaboration étroite entre dramaturge et metteur en scène.
Wozzek à l’Opéra de Lyon
En octobre 2024, les L3 de Lettres modernes ont assisté à l’opéra d’Alban Berg, mis en scène par Richard Brunel. Cet opéra, tiré de la pièce de Georg Büchner, raconte les événements qui s’acharnent sur Wozzeck, bouc émissaire d’un univers impitoyable. La seconde partie de cette rencontre a donc été rythmée par les questions des étudiantes et étudiants sur l’opéra.
Pour Wozzeck, Catherine Ailloud-Nicolas avait identifié trois hypothèses dramaturgiques, avec l’idée de coller à notre époque et de faire un opéra qui parle au public actuel :
- La misère sociale
- L’expérience
- La folie mentale
C’est l’idée de l’expérience qui est retenue. Une expérience qui va au-delà de celle du livret, à la manière du film The Truman Show (Peter Weir, 1998).
Quelques questions des étudiantes et étudiants à Catherine Ailloud-Nicolas
Dans le livret, il est suggéré que Wozzeck se noie, mais une étudiante fait remarquer que ce n’est pas le cas sur scène. Catherine Ailloud-Nicolas explique : une fois l’hypothèse dramaturgique choisie, elle guide la mise en scène. L’hypothèse dramaturgique de l’expérience ayant été retenue, la scénographie prend place dans une maison. La question qui se pose devient donc : comment le personnage peut-il se donner la mort dans ce lieu ? L’important est toujours de donner du sens.
« Comment aimer l’opéra quand on est hermétique à ça ? » demande un étudiant.
Premièrement, il faut sortir des clichés : l’opéra serait pour les vieux, pour les riches... Ensuite, on a tellement l’habitude du jeu de cinéma. Que les codes de jeu puissent paraître un peu artificiels à cause du chant Enfin, c’est un art qui demande une initiation. Elle conseille d’y aller plusieurs fois : on aime rarement l’opéra la première fois. « L’opéra c’est une émotion qu’on ne trouve nulle part ailleurs ».
Enfin, Catherine Ailloud-Nicolas et les étudiants ont échangé à propos de la dernière scène. La dramaturge raconte que de multiples fins ont été imaginées. La scène du repas familial a finalement été trouvée 15 jours avant le début des représentations.
Les grands entretiens
Catherine Ailloud-Nicolas anime également à l’Opéra de Lyon des rencontres avec les metteurs et metteuses en scène de la saison. Les grands entretiens sont ouverts à toutes et à tous, alors n’hésitez pas à y assister !
Les prochains entretiens :
- Peter Grimes, vendredi 9 mai 2025 à 18h30, entretien avec Christof Loy
- Così fan tutte, samedi 14 juin 2025 à 18h30, entretien avec Marie-Ève Signeyrole
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Les étudiants de Lettres modernes ont eu la chance d’assister à une répétition de l’oratorio Il Trionfo della Grazia. Ils ont également pu rencontrer les artistes et assister à la représentation du 11 février 2024.
Six étudiantes de troisième année de la Licence de Lettres modernes ont effectué un travail de reportage autour de l’opéra L’Arche de Noé. C’est dans le cadre du cours Littérature et opéra qu’elles ont suivi pendant près de 6 mois les équipes de ce projet de la Maîtrise de l’Opéra de Lyon.