Table ronde : Notre démocratie est-elle si vulnérable ?

La démocratie est-elle passée de mode ? Nos démocraties libérales sont aujourd’hui confrontées à des défis nouveaux, de plus en plus intenses : montée des populismes et des autoritarismes, transition écologique et numérique, polarisation au sein du débat public, crise de la confiance et de la médiation institutionnelle, inégalités sociales, instabilité géopolitique… Face à ces multiples facteurs de fragilisation internes et externes, notre démocratie est-elle en péril ?

Ce sera la question posée aux intervenants de la deuxième table ronde des Journées de l’UCLy, « la fragilité supposée de la démocratie et des institutions », jeudi 11 avril à 11h.

Animateur : Guillaume Tabard

Guillaume Tabard est rédacteur en chef et éditorialiste politique du Figaro, et anime une chronique sur Radio Classique. Lauréat du prix Lagardère du journaliste de l’année en 2017, il a publié plusieurs ouvrages, en particulier consacrés à la droite française ainsi qu’à la présidence d’Emmanuel Macron.

La fin de la fin de l’Histoire

« La fin de l'Histoire ». La prédiction de Francis Fukuyama après la chute de l'Union Soviétique n’en finit plus d’être moquée. Elle reflète pourtant une véritable lecture du monde des années 90. Selon le politologue, la victoire des démocraties libérales devait entraîner un effet domino mondial. La démocratie et l’économie de marché s'étaient révélés comme les solutions uniques pour atteindre la prospérité. En l’an 2000, cette prédiction se vérifiait presque : La part de la population mondiale vivant dans une démocratie était alors de 54%.

Hélas, ce chiffre reste aujourd’hui le plus haut jamais atteint. Il a depuis connu une forte baisse pour atteindre 28% de la population mondiale en 2022. Parmi les 72% de la population vivant en autocratie ou en démocratie limitée, 37% vit même sous un régime « autoritaire » selon le Democracy Index 2022.

Intervenant : Jean-Christophe Fromantin

Jean-Christophe Fromantin est maire indépendant de Neuilly-sur-Seine depuis 2008, et fut député entre 2012 et 2017. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, notamment « Mon village dans un monde global, la place de la France dans la mondialisation » et « La France réconciliée ». Il est actuellement candidat aux élections européennes à la tête de la liste « Notre Europe ».

Démocratie contre autocratie : une compétition mondiale

Cette opposition n’est pas qu’une affaire nationale. La guerre en Ukraine a remis au goût du jour les affrontements de blocs. On trouve d’un côté les démocraties libérales de l’Union Européenne. De l’autre, la Russie glisse chaque jour un peu plus vers un système aux caractéristiques fascistes. Malgré des simulacres d'élections, sans opposition ni crédibilité, Vladimir Poutine dirige le pays en s’appuyant sur l’armée et les services de sécurité.

Mais si la Russie reste un pays difficile à envier, avec son économie de matières premières et des résultats désolants en termes de développement humain et d’espérance de vie, la montée de la Chine est une tout autre challenge. De plus en plus autoritaire depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping, le pays est aussi devenu une incontestable superpuissance. Son essor économique a relativisé l’importance de la démocratie pour atteindre la prospérité. Inspirés par la Chine, ou par crainte d’être dépassés par elle, d’autres pays remettent désormais en cause le modèle démocratique. L’Inde, hier la « plus grande démocratie au monde » se tourne aujourd’hui de plus en plus vers le nationalisme…

Dans cette nouvelle ère de compétition internationale, le bloc des démocraties occidentales reste à la fois prospère, puissant et innovant. Pourtant, il semble avoir perdu son pouvoir de séduction. Mais il n'est pas le seul à faire face à des défis. Derrière la façade austère, les pays autoritaires connaissent eux-aussi de graves difficultés. La Chine est confrontée à une démographie en chute libre et à une crise économique sans précédent. En Russie, le poids des sanctions et les difficultés militaires en Ukraine mettent à mal le mythe impérial de Poutine.

Dans cet affrontement à distance, les systèmes démocratiques sont-ils réellement plus vulnérables que les autocraties ? La question reste ouverte.

Intervenant : Georges Képénékian

Chirurgien de profession, Georges Képénékian a été premier adjoint de la mairie de Lyon de 2014 à 2020, puis maire de Lyon entre 2017 et 2018 lors de la nomination de Gérard Collomb au Ministère de l’Intérieur. Arménien d’origine, il s’est particulièrement engagé dans la reconnaissance du génocide arménien, en France et dans le monde

La démocratie face aux réseaux

Et si le plus grand adversaire de la démocratie était aujourd’hui... Elle-même ?  Les démocraties sont par nature ouvertes à la contradiction, à leur propre remise en question. Cette qualité a souvent été considérée comme leur plus grande force. L’essayiste et statisticien Nassim Taleb, auteur du livre Le Cygne Noir, décrivait la démocratie comme « antifragile ». C'est à dire un système qui tend à se renforcer au lieu de s’affaiblir lors d’une crise.

Est-ce toujours vrai à l’heure des réseaux sociaux et des « bulles d’opinions » générées par les algorithmes ? Aux États-Unis, la polarisation politique atteints des sommets depuis l’émergence de Donald Trump. Désormais, des politologues américains craignent l’émergence de deux populations américaines distinctes, incapables de communiquer ou d’arriver au moindre compromis de gouvernement. En Europe, la montée de l’extrême-droite se poursuit. Les forces politiques eurosceptiques sont données favorites pour atteindre la majorité lors des prochaines élections européennes. De l’autre côté de l’échiquier politique, l’urgence écologique pousse de nombreux militants écologistes à exiger des actions radicales... Jusqu’à sortir du cadre démocratique ?

Les français ne s’y trompent pas, lors du sondage Odoxa réalisé pour ces Journées de l’UCLy, ils sont 69% à considérer notre démocratie comme « vulnérable ». Un chiffre en hausse de 15 points en deux ans. Russie et Chine y voient d'ailleurs une opportunité. Désormais, ils ne se cachent plus de mener de véritables campagnes de déstabilisation en Occident grâce aux réseaux sociaux.

Ces évolutions sont-elles une fondamentale remise en question de nos démocraties, ou les simples soubresauts de leur adaptation aux réalités du XXIème siècle ? Où trouver les ressources nécessaires pour se repenser et se reconstruire ? Nos invités proposeront leurs réponses.

Marjolaine Monot-Fouletier

Docteur en droit depuis 1999 et HDR depuis 2019, Marjolaine Monot-Fouletier est professeur à la Faculté de droit de l’Université catholique de Lyon. Elle concentre ses activités de recherche et d’enseignement dans les domaines du droit administratif, du droit administratif des biens et du droit des libertés fondamentales. Elle est également responsable du Pôle de recherche en sciences juridiques, politiques et sociales au sein de l’unité de recherche CONFLUENCE : Sciences et Humanités et membre de l’European Law Institute (ELI).

Le récit contemporain de l’effondrement est-il crédible ?

Notre société court-elle inévitablement à sa fin ?

Patrick Martin : L’entreprise, source de résilience ?

Patrick Martin sera l’invité des Journées de l’UCLy, le jeudi 11 avril à 16 h. Le nouveau président du MEDEF a pris la tête du syndicat à un moment charnière. Son objectif est ambitieux : Faire de l’entreprise une force motrice pour l’adaptation de notre société face aux crises. Il présentera cette vision lors de la dernière table ronde des Journées de l’UCLy, le jeudi 11 avril à 16 h : « Les entreprises, lieu de résilience face aux défis contemporains ?

Alain Bernard : Les leçons du sport

A quelques mois des Jeux Olympiques de Paris, l’UCLy a la chance de recevoir l’un des plus grands athlètes de l’Histoire de la natation française. Quadruple médaillé aux Jeux Olympiques (dont deux d’or), plusieurs fois recordman du monde du 100m nage libre, Alain Bernard sera le Grand Témoin des Journées de l’UCLy, le jeudi 11 avril à 14h30.

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