XV-2 - Stanislas Breton, la quête inachevée (2010)

Revue des Facultés de Théologie et de Philosophie

Présentation du numéro

Il est difficile, et peut-être même impossible, de présenter en quelques lignes la figure du philosophe Stanislas Breton (1912-2005). Si l’on considère l’étendue et la diversité des domaines envisagés, on peut dire qu’il fut d’abord un esprit curieux, toujours soucieux de comprendre le monde dans lequel il a vécu. Mieux encore, Stanislas Breton n’a jamais cessé de confronter sa propre pensée aux courants philosophiques contemporains et d’instaurer ainsi un dialogue permanent entre Christianisme et philosophies. On notera également le caractère spéculatif de sa pensée, la profondeur avec laquelle chaque question est envisagée peut encore dérouter le lecteur. Et cependant, on appréciera la dimension parfois très poétique de son écriture, donnant alors à son œuvre, une allure plus légère. Mais au fond, sa pensée est toujours un effort pour envisager la question du principe. Une pensée qui ne peut être que "transit" dans la mesure où ce principe est toujours hors de prise… Penser la profondeur du principe et reconnaître son inaccessibilité fondamentale… Oportet transire… Il convient de passer, d’aller constamment au-delà, la démarche philosophique est une quête toujours inachevée vers un quelque chose qui sans cesse nous échappe.

Certes, il est possible de repérer dans sa vie quelques grandes étapes et un certain nombre de textes. Après un temps d’enseignement à Rome, Stanislas Breton a été professeur à l’Université catholique de Lyon et ensuite à l’Institut catholique de Paris, avant de terminer sa carrière en tant que maître de conférences à l’Ecole Normale Supérieure, rue d’Ulm. Pendant cette période, il va entreprendre une œuvre considérable composée d’une quarantaine d’ouvrages et de plus de 200 articles dont certains n’ont pas encore été publiés. Le premier document que nous proposons dans ce dossier est un texte inédit, une leçon inaugurale qu’il a prononcé le 22 octobre 1987 à la Faculté de Philosophie de l’Université catholique de Lyon, et le second est la transcription d’un manuscrit qui fait partie du Fonds Breton déposé à la bibliothèque de l’Institut catholique de Paris, signe de la vitalité des études sur cette grande figure de la pensée au XXe siècle.

En lui consacrant tout un numéro, la revue Théophilyon n’a pas la prétention d’analyser de manière exhaustive la figure de Stanislas Breton. Il s’agit plutôt d’évoquer à travers différents aspects la richesse intellectuelle de celui qui a enseigné pendant plusieurs années à Lyon. Ainsi, l’article d’Hubert Faes rappelle tout d’abord que Stanislas Breton pose de façon tout à fait originale les rapports entre philosophie et théologie. Ensuite, celui de Pierre Gire montre comment le néoplatonisme occupe pour Breton une place décisive dans l’intelligibilité du Christianisme. Et enfin, les articles de Patrick Royannais et de Marie-Odile Métral envisagent les principales sources scripturaires et théologiques de sa pensée, à savoir

Thomas d’Aquin et une méditation sur Le Verbe et la Croix. Deux annexes rédigées par Jeanne-Bernard A., Marie-Odile Métral et Pierre Gire, viennent compléter ce dossier et préciser la figure du philosophe.

Dans les mélanges, Eric Mangin propose une étude sur la figure du Christ chez Maître Eckhart à partir de l’expérience amoureuse, puis Daniel Moulinet analyse l’image du prêtre à travers l’exemple de Jean-Marie Vianney, curé d’Ars, et enfin Dominique Bertrand envisage avec finesse et originalité l’eschatologie d’Irénée de Lyon. Dans les chroniques régionales, Pascale Petit reprend les grandes lignes d’une journée d’étude sur « le sacerdoce et les ministères » qui s’est tenue à Lyon le 19 mai dernier à la Faculté de théologie, et Philippe Abadie présente le dernier livre de Pierre Gibert, L’Invention critique de la Bible. XVe-XVIIe siècle, paru cette année aux éditions Gallimard, sur le rapport entre Bible et histoire.

Reprenons alors pour conclure la formule de Stanislas Breton dans l’article « Saint Thomas et l’intelligence de la foi » publié au début de ce dossier : « Chaque époque de la foi a sa manière de répondre aux interrogations qui lui sont adressées ».

Résumés des articles du second volume du 15ème tome de la revue Théophilyon

Pierre Gire - Christianisme et Néoplatonisme chez Stanislas Breton

La tradition chrétienne et le mouvement de pensée que constitue le Néoplatonisme dans la pluralité de ses thématiques, interfèrent au sein de l'œuvre de Stanislas Breton. Ce croisement s'opère sur des plans d'intelligibilité différents. D'un point de vue philosophique, le développement de la question du Principe-néant génère une interrogation radicale sur les prétentions des onto-théologies, sur les affirmations classiques de la causalité créatrice et de l'unicité du Révélateur, sur les langages théologiques eux-mêmes. D'un point de vue mystique, la reprise de la précédence « méontologique » néoplatonicienne de l'Absolu aboutit à la redéfinition du rapport entre le Néant de Dieu et le « germe de non-être » de l'âme dont la Croix du Christ objective la radicalité pour le chrétien qui reconnaît là le passage de son Dieu dans l'humanité.

Hubert Faes - Philosophie et théologie dans la pensée de Stanislas Breton

Stanislas Breton a vécu et réfléchi la relation philosophie/théologie tout au long de sa trajectoire personnelle. La théorie élaborée qu'il en propose dans son livre Du Principe montre qu'il ne se contente pas d'une approche historique ni simplement d'une épistémologie. Elle relève d'une ontologie critique tournée vers une notion radicale du principe. Philosophie et théologie sont l'une et l'autre en quête du principe en présupposant le pensable en général, en particulier le théologique, c'est-à-dire la réalité concrète des rites et des croyances. Les considérant l'une et l'autre dans cette situation, on peut rendre compte à la fois de leur différence dans la manière de chercher le principe, de leur égalité et complémentarité dans la recherche humaine du principe.

Patrick Royannais - Se rendre à la radicalité, horrible de la Croix

Relire trente ans après sa parution « Le verbe et la Croix » pourrait être aussi risqué qu'ouvrir une boîte de Pandore. Nombre de questions jaillissent de ces quelques pages, à peine deux cents. L'auteur de l'article en a retenu trois qui lui permettent de traverser l'ouvrage de Stanislas Breton. Il repère d'abord la forme et le contenu d'un discours chrétien, c'est-à-dire d'un commentaire du logos de la croix. Quel discours est possible si la folie, celle de Dieu, est l'unique sagesse ? Il interroge ensuite la validité de la distinction entre philosophie théologie devant le logos de la croix qui pourrait bien être fin des discours, leur croix. Enfin, il tâche d'expliciter l'interrogation de Breton quant au propre de la confession de foi chrétienne, condensée dans le dogme. Si Dieu demeure non pas seulement inaccessible mais ne revendique rien pour lui, s'efface pour servir et non être servi, les discours à son propos ne sont-ils pas réduits à la contingence voire à la misère de leurs conditions de production ? Peut-on dire de Dieu autre chose que l'exigence de justice au service des petits ? Mais alors, faut-il que cette exigence ait encore un nom divin ? Que reste-t-il de l'affirmation chrétienne ?

Marie-Odile Métral - Si saint Thomas m'était conté à la manière de Stanislas Breton

Saint Thomas d'Aquin constitue dans l'œuvre de Breton un intertexte important. Son style littéraire et même poétique est marqué par la rigueur de l'argumentation scolastique dans laquelle il a été formé. Mais pour les textes de saint Thomas comme pour tous ceux à partir desquels il pense et qu'il ne manque pas de repenser, Stanislas Breton garde la liberté du commentaire cordial. Comme dans une veillée où l'on ferait mémoire du saint, j'ai imaginé de raconter saint Thomas à la manière de Stanislas Breton autour de questions capitales : celles de la sagesse, de la causa sui, de l'amitié et de la mystique. Dans la liberté de pensée que j'ai apprise auprès de Stanislas Breton, j'ai moi-même élaboré mon commentaire cordial, en particulier à propos de l'amitié.

Pierre Gire - Hommage à Stanislas Breton

Daniel Moulinet - Jean-Marie Vianney, figure de prêtre et sa réception dans l'histoire

Éric MANGIN - La manifestation du Christ et l'expérience de l'amour - Une approche phénoménologique de Maître Eckhart

Marie-Odile Métral, Jeanne-Bernard A. - Notice bibliographique sur Stanislas breton

Stanislas Breton - Saint Thomas d'Aquin et l'intelligence de la foi

Stanislas Breton - Théologie et Philosophie

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