Pierre Gibert

Pierre Gibert, jésuite, exégète et lecteur passionné de la Bible

Pierre Gibert (1936-2024) fut l’un des grands exégètes français de la fin du XXᵉ siècle. Prêtre jésuite, professeur et chercheur, il consacra sa vie à l’étude des textes bibliques, qu’il sut aborder avec une rigueur scientifique et une ouverture intellectuelle qui ont profondément marqué la théologie contemporaine.

Des débuts entre philosophie et exégèse

Né à Aix-en-Provence le 24 octobre 1936, Pierre Gibert découvrit très tôt la Bible, lecture qui marqua durablement sa vocation. Après des études au Grand Séminaire de Clermont-Ferrand, il effectua 28 mois de service militaire, dont plus d’un an en Algérie — une expérience décisive qu’il relatera plus tard dans Il ne se passe rien en Algérie (février 1958-avril 1959).

Entré dans la Compagnie de Jésus en 1959, il développa un goût prononcé pour la philosophie politique en découvrant Tocqueville, avant que le père Paul Beauchamp ne l’oriente vers l’exégèse biblique. Ses études le menèrent en Allemagne, auprès de Norbert Lohfink, professeur à la faculté de théologie de Sankt Georgen à Francfort, où il approfondit sa maîtrise des langues et de l’histoire des textes.

Un exégète rigoureux et ouvert sur les sciences humaines

La rencontre avec Michel de Certeau fut déterminante. À son instigation, Pierre Gibert entreprit des recherches sur les récits populaires dans la Bible, et soutint en 1974 une thèse sur l’exégète allemand Hermann Gunkel, dirigée par l’historien Jacques Le Goff. Gunkel, pionnier de l’histoire des religions, inspira à Gibert une approche renouvelée et critique des formes littéraires bibliques.

En 1988, il soutint une seconde thèse consacrée au cycle de Gédéon dans le Livre des Juges, confirmant la profondeur de son engagement intellectuel et spirituel. Son œuvre témoigne d’un dialogue constant entre foi, histoire et sciences humaines.

Enseignant, chercheur et passeur de la Parole

Professeur d’exégèse biblique à l’Institut catholique de Paris et au Centre Sèvres (Facultés Loyola), Pierre Gibert enseigna aussi pendant plus de vingt ans aux Facultés catholiques de Lyon, où il fut doyen de la faculté de théologie de 1991 à 1997.
Directeur de la revue Recherches de science religieuse (1998-2008), il publia de nombreux ouvrages, dont Petite histoire de l’exégèse biblique (Cerf, 1992), et collabora à la nouvelle traduction de la Bible Bayard (2001) coordonnée par Frédéric Boyer.

Jusqu’à sa mort, le 22 juin 2024 à Paris, Pierre Gibert mit son érudition au service d’une lecture pluridisciplinaire de la Bible, attentive à sa dimension historique, artistique et spirituelle. Il s’intéressa aussi à la représentation des récits bibliques dans l’art sacré, qu’il considérait comme une autre forme d’exégèse.